René KNOCKAERT a passé son bac en 1944 au collège municipal d’Armentières

vendredi 5 juillet 2019

Serge BERLEM

René Knockaert a passé son bac en 1944 au collège municipal d’Armentières (Voix du nord du 5 juin 2019)

Alors que les résultats du Bac 2019 vont tommber, voici ce qu'écrit LA VOIX DU NORD

René Knockaert est un Armentiérois de 92 ans, née en décembre 1926. Il a été scolarisé au collège municipal d’Armentières, aujourd’hui lycée Paul-Hazard, pendant la Seconde Guerre mondiale. Il était en première en 1943 et en terminale en 1944. Il a donc passé toutes les épreuves du bac en plein conflit. Récit.

Scolarisé au collège municipal d’Armentières, René Knockaert habitait à l’époque Houplines. En juin 1943, à la fin de sa première, il a passé ses premières épreuves du bac à Lille, à la faculté de lettres et droit, rue Angellier. Il avait dû prendre une nuit d’hôtel, la veille, sur place, pour être sûr d’être à l’heure le Jour J. « Nous étions debout, 50 à 100, sur les marches, devant la faculté, à attendre l’ouverture des portes quand est survenue une patrouille allemande d’une quarantaine de soldats qui chantaient. Moi et d’autres, on les a sifflés. Les soldats ont rompu les rangs et foncé sur nous. Il y a eu quelques coups de crosse mais pas de blessés graves. On a pu passer le bac normalement », se remémore-t-il.

« On était assignés à résidence. Mais en petits groupes, avec des professeurs, on allait les uns chez les autres pour finir le programme et réviser. »

 

« Compte tenu des bombardements aux alentours, la scolarité avait été interrompue pour tous, en mai. Nous travaillions chez nous sans savoir comment allait se passer nos examens. Le 6 juin, il y a eu le Débarquement puis, par la suite, le reflux des troupes allemandes qui rentraient vers l’Allemagne. Le 22 juin, il y avait eu des bombardements à Armentières et 150 morts. » Mais les élèves ont bien continué à potasser leur bac.

« On était assignés à résidence. Mais en petits groupes, avec des professeurs, on allait les uns chez les autres pour finir le programme et réviser. C’est ainsi que notre classe passa quelques heures agréables sur la terrasse de la Banque de France dont le directeur était le père d’une camarade. Avant, on n’avait pas l’impression d’être dans la guerre, puis on a eu le sentiment de rentrer vraiment dans la bataille. »

À cause de la chaleur et des potentiels bombardements, il révisait aussi dans sa cave.

Fin juillet début août, René Knockaert et ses camarades ont appris qu’ils passeraient bien leur bac, en août, avec un changement notable. « Tous les ans, les élèves étaient convoqués dans un seul centre d’examen situé à Lille. Comme les déplacements n’étaient plus possibles, ont été mis en place des centres d’examen éclatés dont un à Armentières, dans mon établissement. On l’a passé dans les caves. »

Il ne se souvient pas avoir eu peur en passant son bac, mais craignait les bombardements. René a obtenu son bac avec une mention bien. « Quinze jours après le bac, c’était la libération d’Armentières, un peu sanglante ».

Un adolescent en temps de guerre

« On avait une vie normale sauf qu’on ne bougeait pas beaucoup », se rappelle René Knockaert. Il se souvient avoir vécu « au jour le jour ». « On ne pouvait pas aller sur la côte à cause des soldats. Pendant les vacances, on faisait un peu de sport et des balades. J’ai aussi fait du théâtre. J’étais aussi le responsable, pour le collège, de la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC). On organisait, hors du collège, des cercles d’études. Grâce à cela, j’ai eu des contacts avec des élèves de Saint-Jude et on a fait des campings pendant les vacances. J’allais aussi beaucoup au cinéma. Tout le monde écoutait Radio Londres et on en parlait librement en classe. Certains avaient leurs parents dans la Résistance ou étaient dedans. »

Les bals étaient interdits et un couvre-feu était imposé à tous. « Nous allions quand même les uns chez les autres et on organisait des surprise-parties. On écoutait du jazz, on buvait de l’alcool, on dansait… »

Cette photo présente René et ses camarades de classe en juillet
1943. Ils étaient partis faire une excursion au mont Noir, après avoir passé leurs premières épreuves du BAC en première.

Un collège mixte

« Avant la guerre, il y avait le collège municipal, Saint-Jude et le collège des filles à Armentières. Pendant, celui des filles était entièrement occupé par les Allemands. Le mien l’était à moitié, se souvient René Knockaert. Notre établissement est devenu mixte. Tout le monde, filles comprises, était dans cette moitié. Ma classe était mixte, j’étais en section philo. Des couples se sont formés et se sont même mariés après. La récréation se faisait par roulement car les classes étaient de minimum 40 élèves. »

René Knockaert a eu le sentiment que « la scolarité n’a pas changé par rapport à ce qu’elle était avant la guerre ». Il avait cours « normalement », il ne chantait pas « Maréchal, nous voilà » car, il l’a su plus tard, certains de ses profs étaient des résistants. Mais il y avait tout de même « un manque de professeurs car des hommes avaient été faits prisonniers ».

La classe de René en
1943 était mixte.

René, une figure armentiéroise

René Knockaert a été médecin généraliste à Armentières de 1953 à 1990. Il a aussi été, entre autres, président du syndicat des médecins d’Armentières, chargé de la coordination médicale nationale des centres d’accueil de demandeurs d’asiles et de réfugiés, mais aussi créateur de l’association Amitiés franco-marocaines de la région d’Armentières, et conseiller municipal à Armentières.